Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/482

Cette page n’a pas encore été corrigée
470
ÉLOGE DE L'HÔPITAL.


de nouveaux abus, d’appliquer des lois qu’il aurait voulu réformer, de juger des procès lorsque son génie le portait à approfondir les grands principes de la législation, il se voyait forcé d’employer à discuter des intérêts incertains et minutieux, un temps qu’il brûlait de consacrer tout entier à la recherche de la vérité ; son âme, que le seul plaisir d’avoir été juste ne pouvait remplir, était dévorée du désir de réparer cette foule de maux dont il apprenait tous les jours à mieux connaître l’étendue et la profondeur. Pour les grands génies et les âmes élevées, il n’y a que deux plaisirs, celui de servir son pays, et celui de découvrir des vérités ; ou plutôt il n’y en a qu’un, celui d’être utile à ses semblables ; car la découverte de la vérité est un des plus sûrs moyens de faire du bien aux hommes.

La place de chancelier de France était remplie par Olivier, digne alors d’être l’ami de l’Hôpital : homme simple dans ses mœurs et ferme dans sa conduite, d’un caractère modéré, d’une âme élevée et forte ; indigné des vices de la cour, mais restant à la cour pour tempérer les funestes effets de ces vices ; opposant aux déprédations des favoris son exemple et l’autorité de sa place ; prêt à la perdre plutôt que de cesser d’être l’homme de la nation, mais plus propre à s’opposer au mal qu’à en chercher les sources et à les tarir ; agissant peu, mais peut-être par cela même plus fort contre la calomnie et contre l’intrigue.

Olivier connaissait les talents de l’Hôpital : il fit consentir le fils de François I er à employer une créa-