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ÉLOGE DE M. EULER.


vent il ne cherchait qu’à montrer les forces et les ressources de son art ; et on doit lui pardonner si quelquefois, en paraissant s’occuper d’une autre science, c’était encore au progrès et à la propagation de l’analyse que ses travaux étaient consacrés, puisque la révolution qui en a été le fruit est un de ses premiers droits à la reconnaissance des hommes, et un de ses plus beaux titres à la gloire.

Je n’ai pas cru devoir interrompre le détail des travaux de M. Euler par le récit des événements très-simples et très-peu multipliés de sa vie.

Il s’établit à Berlin en 1741, et y resta jusqu’en 1766. Madame la princesse d’Anhalt-Dessau, nièce du roi de Prusse, voulut recevoir de lui quelques leçons de physique ; ces leçons ont été publiées sous le nom de Lettres à une princesse d’Allemagne, ouvrage précieux par la clarté singulière avec laquelle il y a exposé les vérités les plus importantes de la mécanique, de l’astronomie physique, de l’optique et de la théorie des sons, et par des vues ingénieuses moins philosophiques, mais plus savantes que celles qui ont fait survivre la pluralité des mondes de Fontenelle au système des tourbillons. Le nom d’Euler, si grand dans les sciences, l’idée imposante que l’on se forme de ses ouvrages, destinés à développer ce que l’analyse a de plus épineux et de plus abstrait, donnent à ces lettres si simples, si faciles, un charme singulier : ceux qui n’ont pas étudié les mathématiques, étonnés, flattés peut-être de pouvoir entendre un ouvrage d’Euler, lui savent gré de s’être mis à leur portée ; et ces détails élémentaires des sciences ac-