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ÉLOGE DE M. DE BUFFON.


prend à se rendre capable d’observer immédiatement la nature ; c’est là encore, qu’après l’avoir étudiée, on apprend à juger ses propres observations, à les comparer, à en tirer des résultats, à se rappeler ce qui a pu échapper au premier coup d’œil. C’est dans les cabinets que commence l’éducation du naturaliste, et c’est là aussi qu’il peut mettre la dernière perfection à ses pensées. Le Cabinet du roi est devenu, entre les mains de M. de Buffon, non un simple monument d’ostentation, mais un dépôt utile, et pour l’instruction publique, et pour le progrès des sciences. Il avait su intéresser toutes les classes d’hommes à l’histoire naturelle ; et pour le récompenser du plaisir qu’il leur avait procuré, tous s’empressaient d’apporter à ses pieds les objets curieux qu’il leur avait appris à chercher et à connaître. Les savants y ajoutaient aussi leur tribut, car ceux même qui combattaient ses opinions, qui désapprouvaient sa méthode de traiter les sciences, reconnaissaient cependant qu’ils devaient une partie de leurs lumières aux vérités qu’il avait recueillies, et une partie de leur gloire, à cet enthousiasme pour l’histoire naturelle qui était son ouvrage. Les souverains lui envoyaient les productions rares ou curieuses dont la nature avait enrichi leurs États. C’est à lui que ces présents étaient adressés ; mais il les remettait dans le Cabinet du roi, comme dans le lieu où, exposés aux regards d’un grand nombre d’hommes éclairés, ils pouvaient être le plus utiles.

Dans les commencements de son administration,