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ÉLOGE DE M. DE FOUCHY.


liberté. Elle seule a rendu les vérités éternelles, elle seule en a fait le patrimoine commun de tous les hommes, et c’est par elle seule qu’il n’existe plus aucun terme ni aux progrès de l’esprit humain, ni à la perfection des institutions sociales.

La reconnaissance suffirait donc pour excuser le luxe des belles éditions ; mais il est juste d’observer encore que la perfection même la plus recherchée dans les arts utiles, ne doit pas être regardée comme un raffinement de fantaisie. Sans ces éditions superbes, qui ne servent qu’à flatter le goût de quelques amateurs riches, on ne parviendrait pas à rendre faciles à lire les éditions communes. Pour que le grand nombre jouisse du progrès d’un art, il faut presque toujours qu’auparavant ces mêmes progrès aient procuré, au petit nombre, des plaisirs exclusifs. Les productions des arts, qui joignent une utilité réelle et nouvelle à la magnificence et à la rareté, ne doivent donc point attirer à ceux qui les recherchent la censure des moralistes même les plus sévères, et il est juste de pardonner aux riches des fantaisies qui peuvent un jour ouvrir à tous les hommes de nouvelles sources de jouissances.

Rempli d’enthousiasme pour son art, le père de M. de Fouchy destinait son fils à lui succéder ; il lui réservait l’honneur d’achever son ouvrage, en y ajoutant les alphabets des langues orientales qui manquaient encore. Aussi, après une éducation soignée et dirigée suivant le vœu de son père, qu’il avait perdu dès son enfance, M. de Fouchy s’occupa de dessiner et de faire graver des lettres hébraïques.