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ÉLOGE DE M. DE PRASLIN.


nées parmi nous aux amateurs éclairés des sciences, puisque ses actions, puisque l’influence qu’il a eue sur la prospérité nationale ont été ses titres, nous en devons compte au public, afin qu’il juge si c’est un bienfaiteur de la patrie que nous avons rendu un hommage mérité.

La guerre de 1755 avait été malheureuse : les politiques qui l’avaient préparée n’avaient calculé ni la puissance du génie de Frédéric, ni tout ce qu’un homme éloquent et audacieux oserait exiger de la nation anglaise et saurait en obtenir. De toutes les possessions de la France en Amérique, en Asie, en Afrique, il ne lui restait que Saint-Domingue, les îles de France et de Bourbon, et des établissements, jusqu’alors inutiles, à Cayenne et sur le Mississipi. La perte de ces possessions paraissait inévitable si la guerre était prolongée ; l’Espagne, notre alliée, s’était déjà vu enlever l’île de Cuba ; on craignait pour celle de Manille ; crainte que l’événement a justifiée. Si nous avions pris Minorque au commencement de la guerre, Belle-Isle était tombée depuis aux mains des Anglais, et il ne restait sur mer que de nouveaux désastres à prévoir pour nos alliés comme pour nous-mêmes. En Allemagne, nous avions à craindre d’être réduits à soutenir une guerre défensive sur nos frontières. La Russie paraissait décidée à renoncer à des alliances qu’elle avait formées sans aucun intérêt réel, et les succès de l’Autriche contre le roi de Prusse étaient au moins incertains. Cependant, dans les dernières années, l’épuisement des finances n’avait permis à la France que des efforts trop fai-