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ÉLOGE DE M. MORAND.


qui, par la confiance qu’elles lui avaient montrée, avaient vaincu sa répugnance pour la pratique. Cette confiance n’a pas été trompée, si on en juge par leurs regrets et par le désir qu’elles m’ont témoigné île rendre ici en leur nom, à M. Morand, un témoignage public de leur reconnaissance.

M. Morand, fils d’un ancien académicien, était né, pour ainsi dire, dans le sein de cette compagnie ; il en avait connu dès l’enfance le régime intérieur, et il l’aima toujours comme sa patrie. Sévèrement attaché à la règle, même dans les petites choses ; ennemi des innovations, mais sans avoir l’humeur qui accompagne presque toujours cette disposition, et qui en trahit alors le motif ; ceux même dont il combattait les opinions, respectaient la sincérité de son zèle et la pureté de ses intentions. Nous l’avons vu remplir, il y a peu d’années, les fonctions de directeur, avec ce mélange d’amour pour la règle et de condescendance pour ses confrères, que doit réunir le chef annuel d’une compagnie où il ne peut voir que des égaux ; tandis qu’il savait soutenir les intérêts de son corps avec cette dignité modeste si convenable au représentant d’une académie qui doit toute sa considération à son utilité réelle, et au mérite personnel de ceux qui la composent.

La santé de M. Morand paraissait nous promettre de conserver encore longtemps un confrère qui nous était cher ; mais il fut attaqué d’une péripneumonie maligne, le 9 août 1784, et il y succomba le 13 du même mois, laissant une femme à laquelle il était uni par une amitié très-tendre, et dont il ne lui res-