Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 3.djvu/171

Cette page n’a pas encore été corrigée
159
ÉLOGE DE M. BERGMAN.


état en s’abandonnant à son goût pour la chimie. Il vit ce jeune homme, fut surpris des recherches ingénieuses auxquelles il avait pu se livrer dans un laboratoire particulier, que, malgré la médiocrité de sa fortune et la gène à laquelle il était soumis, il avait su se former : cet élève était M. Schéelle. M. Bergman, instruit de cet événement, voulut voir ce jeune homme, fut étonné de ses connaissances, de ses dispositions heureuses : ce génie naissant ne put échapper à la sagacité d’un maître habile ; dès ce moment M. Schéelle fut son disciple chéri, bientôt son digne émule, et toujours son ami. Au lieu d’affecter sur lui cette supériorité à laquelle un maître renonce avec tant de peine, M. Bergman se trouvait assez grand pour ne vouloir que l’égalité ; et loin de chercher à s’arroger quelque droit sur les travaux de M. Schéelle, on lit dans ses lettres à des chimistes étrangers, qu’il voyait avec une véritable douleur que l’erreur les lui attribuât quelquefois. Sa conduite à cet égard fut la même pour tous ses disciples ; exact à les citer, ardent et habile à faire valoir leurs travaux, il allait au delà même de la justice rigoureuse, qui malheureusement aurait encore été un mérite.

La célébrité de M. Bergman lui avait fait des disciples dans toutes les contrées de l’Europe. En France, nous citerons en particulier deux magistrats qui honorent la magistrature par leurs lumières, par leur zèle ardent et éclairé pour le progrès des sciences, par le courage avec lequel ils se sont élevés au-dessus des préjugés, et qui en même temps ont fait hon-