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ÉLOGE DE M. D’ALEMBERT.


ni la faiblesse de sa santé, ni ses infirmités, n’interrompirent jamais, qu’il suivait encore, il n’y a pas une année, au milieu de ses douleurs, et qui ont produit à cette époque un nouveau volume d’opuscules, où l’on retrouve son génie et cette même finesse, ce même esprit philosophique qui caractérisent toutes ses productions.

Le goût très-vif qu’il avait eu pendant quelque temps pour la littérature et pour la philosophie, n’avait point affaibli sa première passion ; ses ouvrages mathématiques étaient les seuls auxquels il attachât une importance sérieuse ; il disait, il répétait souvent qu’il n’y avait de réel que ces vérités ; et tandis que les savants lui reprochaient son goût pour la littérature, et le prix qu’il mettait à l’art d’écrire, souvent il offensait les littérateurs, en laissant échapper son opinion secrète sur le mérite ou l’utilité de leurs travaux.

L’Académie des sciences a souvent profité de ces mêmes talents qu’on lui faisait un reproche d’avoir cultivés : dans ces assemblées solennelles, où des souverains sont venus au milieu de nous rendre hommage aux sciences, et recevoir celui de notre reconnaissance pour l’intérêt qu’ils prennent à leurs progrès, M. D’Alembert a été plus d’une fois l’organe de cette compagnie. Les circonstances où il est permis de dire des vérités aux princes sont si rares, que M. D’Alembert n’en laissait point alors échapper l’occasion ; il savait exprimer avec force celles qu’il était temps de prononcer, et faire entendre avec finesse d’autres vérités plus contraires aux opi-