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ÉLOGE DE ROEMER.

Olaüs Roëmer naquit à Copenhague en 1644- H travailla d’abord sous Bartholin, chargé par le gouvernement de Danemark de mettre en ordre les manuscrits de Tycho-Brahé ; car la voix de l’Europe, plus forte à la longue que les calomnies des gens de cour, avait enfin forcé la nation de cet illustre astronome à lui rendre justice. Le Danemark s’honorait alors du grand homme qu’on y avait persécuté pendant sa vie. Peu d’hommes de génie ont échappé à cette injustice ; souvent même ils sont à la fois honorés et persécutés : ce fut en France le sort de Descartes et de Bayle, pour ne point parler d’exemples vivants que l’envie ne me pardonnerait pas de citer.

Picard vit Roëmer en Danemark en 1672, et l’attira en France. Il y fut bientôt admis au nombre des académiciens, et donna à l’Académie, en 1675, la preuve du mouvement progressif de la lumière et la mesure de sa vitesse. Il avait observé pendant plusieurs années que, lorsque Jupiter était dans le lieu de son orbite le plus éloigné de la terre où il puisse être observé, les émersions de son premier satellite arrivaient constamment quinze ou seize minutes plus tard que le calcul ne les donnait. Il en conclut que la lumière réfléchie par Jupiter mettait cet excès de temps à parcourir l’excès de la distance, et par conséquent qu’elle mettait seize à dix-huit minutes à parcourir le diamètre de l’orbite de la terre, et huit à neuf à venir du soleil jusqu’à nous, pourvu que sa vitesse fût à peu près uniforme.

Cette découverte eut d’abord des contradicteurs : Cassini, qui avait observé les mêmes phénomènes