Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/93

Cette page n’a pas encore été corrigée
73
ÉLOGE DE CHARAS.


pareil particulier avec lequel on prépare cet électuaire, qui n’est ni la plus importante ni la plus difficile des compositions de pharmacie, a beaucoup contribué, sinon à faire naître, du moins à perpétuer les idées chimériques qu’on s’est formées de ses vertus.

Charas enseigna neuf ans la chimie au collège royal, et fit imprimer ses leçons sous le titre de Pharmacopée royale galénique et chimique. Cet ouvrage fut traduit dans toutes les langues de l’Europe, et même en chinois. L’auteur était protestant : il fut obligé de sortir de France en 1680, et se retira en Angleterre, où il resta jusqu’à la mort de Charles II. Ce prince l’avait appelé, et lui avait fait même l’honneur distingué d’envoyer un de ses yachts le chercher en France. De tels honneurs, lorsqu’on les rend aux places, ne sont qu’une partie de l’étiquette, et la vanité même rougirait de paraître y attacher quelque prix ; mais lorsqu’on les accorde à la personne, ils peuvent devenir un hommage flatteur.

Charas quitta l’Angleterre après la mort de son protecteur. Un Français, qui avait sacrifié à la religion protestante ses places et sa patrie, ne pouvait rien attendre de Jacques II. Il passa donc en Hollande, où il exerça la médecine avec tant de réputation, que l’ambassadeur du roi d’Espagne, Charles II, le crut propre à rétablir la santé ou du moins à prolonger la vie de son maître.

Charas craignait les rigueurs de l’inquisition espagnole, qui n’avait pas toujours respecté la protection des rois. L’ambassadeur dissipa ces craintes, qui