Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/83

Cette page n’a pas encore été corrigée
63
ÉLOGE D’HUYGHENS.


encore à des préjugés antiques, que Descartes n’avait pu déraciner absolument. Il croyait que le nombre des satellites ne devait pas surpasser celui des planètes principales. On ne sait pas combien des idées superstitieuses de toute espèce ont fait manquer de découvertes : le génie peut bien se traîner malgré ses fers, mais il vole quand il a su les briser.

Des observations faites à l’équateur avaient prouvé que le pendule devait y être plus court pour battre des secondes, qu’il ne l’était en France : la pesanteur y était donc moindre [1]. Huygens vit sans peine que cet effet pouvait être produit par la différence de la force centrifuge ; mais il aperçut de plus que si la terre était sphérique, les graves, en conséquence de cette même différence de force centrifuge, ne pourraient tendre perpendiculairement à sa surface ; et il en conclut que, puisqu’ils ont cette direction, la terre est nécessairement aplatie vers les pôles.

Newton a également découvert cet aplatissement, que les mesures des degrés ont confirmé depuis, pourvu que dans ces mesures on tienne compte de l’effet de l’attraction des montagnes, et qu’on ne veuille pas assujettir la surface du globe à une courbe absolument régulière.

Huyghens a fait sur le calcul des probabilités un petit traité que Jacques Bernouilli a donné avec un commentaire, et dont il a formé la première partie de son art de conjecturer. Cette circonstance prouve l’estime qu’il faisait de l’ouvrage d’Huyghens.

  1. Voir, par la date de son ouvrage sur les forces centrales, s’il n’avait pas deviné ce raccourcissement.