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ÉLOGE DE PERRAULT.


parce qu’il découle, des glandes qui aboutissent à sa peau, une liqueur assez abondante.

Le pélican enfin est une espèce d’oiseau de proie aquatique. Au-dessous du bec et de la partie antérieure du cou, est un sac membraneux qui s’ouvre dans le bec, et où cet oiseau peut conserver les poissons qu’il a enlevés, et les rendre ensuite à ses petits. Délaies anciens imaginèrent que, lorsque ses petits manquaient de nourriture, le pélican s’ouvrait l’estomac, et les nourrissait de son sang. Les peintres lui ôtèrent la poche, et lui donnèrent la figure d’un aigle ; sa figure naturelle leur paraissait trop ignoble. Les pères tendres, les rois bons, ou appelés tels, étaient comparés sans cesse au pélican ; et comme si tout cela n’eut pas encore été assez merveilleux, quelques écrivains des siècles d’ignorance avaient avancé, dans des ouvrages sérieux, que le pélican ressuscitait ses enfants morts en les arrosant de son sang.

Qu'un vrai philosophe est heureux, lorsqu’il peut détruire de telles absurdités, qui paraissent indifférentes en elles-mêmes, mais qui, entourant les hommes d’erreurs et de merveilles, les disposent à en adopter de plus funestes à leur bonheur ! comme sont, par exemple, ces remèdes auxquels on attribue des vertus chimériques, et qui, s’ils ne sont pas même nuisibles, empêchent du moins qu’on n’ait recours aux remèdes vraiment salutaires.

Il était impossible qu’un esprit aussi philosophique que celui de Perrault se fût occupé si longtemps de dissection, sans avoir eu des vues générales