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ÉLOGE DE M. DE VAUGANSON


cilier, d’après les intérêts du commerce, l’économie et la perfection, et à faire les sacrifices que ces intérêts exigent ; le service rendu aux arts par l’invention de M. de Vaucanson n’en serait pas moins réel, quand même on serait forcé de faire, dans la pratique ordinaire, des changements à ses machines ; il est toujours plus facile de descendre de la perfection que de trouver des moyens d’y atteindre, et de corriger une méthode que de l’inventer.

M. de Vaucanson croyait que le tirage de la soie ne pouvait se bien faire que dans de grandes fabriques ; cette opinion a été souvent combattue, même par des écrivains estimables ; mais, en général, tout ce qui dans les arts approche de la perfection, tout ce qui peut être donné à bas prix, ne s’exécute que dans les fabriques en grand, parce que c’est là seulement qu’on peut réunir tout ce qui est nécessaire pour la perfection et pour l’économie, le choix des matières, la bonté des instruments, l’usage des machines, l’intelligence dans ceux qui président aux travaux, l’épargne dans l’emploi des forces motrices, des combustibles, des ingrédients nécessaires pour la préparation, enfin la distribution du travail, qui, fixant chaque ouvrier à une simple opération qu’il répète constamment, le met en état de faire mieux en moins de temps.

L’opinion contraire est fondée sur un motif respectable : on suppose que les petites fabriques emploient plus d’hommes, et répandent les richesses dans une plus grande étendue de pays ; mais cette préférence donnée aux petites fabriques nuirait à la