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ÉLOGE DE M. DE VAUGANSON


ailes, et de prêtres automates qui imitaient quelques fonctions ecclésiastiques.

Sa patrie lui aurait offert bien peu de ressources pour cultiver ces premiers germes de son talent ; heureusement, au sortir du collège, le hasard fixa son séjour à Lyon. Les grandes manufactures présentent une foule d’inventions mécaniques que nous admirerions si l’habitude ne nous avait familiarisés avec elles, et si leur usage, ou l’état de ceux qui les exécutent ou qui les emploient, ne semblaient les rabaisser aux yeux des préjugés ; mais elles étaient une source féconde d’instructions pour un homme né avec un véritable talent, qui saisissait tout, et pour qui presque tout était encore nouveau. On parlait alors à Lyon de construire une machine hydraulique pour donner de l’eau à la ville : M. de Vaucanson en imagina une, mais il se garda bien de la proposer ; ce qu’il avait déjà vu l’avait trop convaincu de son ignorance, et le vrai génie n’a besoin tout au plus que d’une seule leçon de modestie.

Il quitta bientôt la province pour venir à Paris, et vit avec une joie qu’il est difficile de se peindre, que la machine de la Samaritaine était précisément celle qu’il avait imaginée à Lyon ; cette conformité lui apprit, ce qu’il ignorait encore, que son goût pour la mécanique était accompagné de quelque talent ; et il s’y livra avec toute l’ardeur qu’une juste espérance de succès peut ajouter à une grande passion. Quelques jours après, la statue d’un flûteur qui orne le jardin des Tuileries, plut à son imagination, et il se sentit frappé de l’idée de faire exécuter des airs