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ÉLOGE DE M. DUHAMEL.


d'Harcourt, il ne retint qu’une seule chose, c’est que les hommes, en observant la nature, avaient créé une science qu’on appelle la liasique, et voyant que cette science s’apprenait mal dans les écoles, il résolut de ne profiter de sa liberté que pour l’étudier.

Il se logea auprès du Jardin du Roi, le seul établissement public où l’on enseignât alors, à Paris, ce qu’il désirait savoir. MM. Dulay, Geoffroy, Lémeri, Jussieu, Vaillant, fuient les amis qu’il choisit au sortir du collège. On peut prévoir assez sûrement ce qu’un jeune homme doit être un jour, en le jugeant d’après ses sociétés ; soit que l’influence de ces premières liaisons s’étende sur toute la vie, soit qu’elles ne fassent qu’indiquer le caractère ou les penchants, et que celui qui choisit mal ait déjà perdu ce qui reste même quelquefois aux hommes vicieux, le goût de la vertu dans les autres.

Tandis que le plus grand nombre des hommes célèbres a pour premier mobile l’amour de la renommée, quelques-uns, dominés par le plaisir de l’étude, semblent avoir oublié la gloire, An moins dans leurs premiers travaux, et s’être étonnés qu’elle vînt ensuite les chercher, ils semblent ne la désirer que comme un témoignage qui les assure du succès de leurs recherches, et ne regarder le plaisir qu’on goûte en la méritant, que comme tribut qu’ils payent à la faiblesse humaine. Tel fut M. Duhamel.

A vingt-huit ans, il n’avait encore étudié que pour lui. Le safran, culture importante dans le Gâtinois, province où sa terre était située, y était attaqué d’une maladie qui paraissait contagieuse ; des