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ÉLOGE DE BLONDEL.


Employé avec succès dans plusieurs négociations, il en fut récompensé par un brevet de conseiller d’État. Deux ouvrages, l’un sur l’art de tirer les bombes, l’autre sur celui de fortifier les places, lui méritèrent le grade de maréchal de camp. Louis XIV, à qui il présenta ces traités, ne voulut point permettre qu’il les publiât : on craignit que nos ennemis ne profitassent des instructions qu’ils renfermaient ; cette crainte prouve, sinon leur mérite, du moins l’opinion qu’on avait de leur auteur. Durant ses voyages, on avait accordé des lettres de noblesse à son père ; cette grâce était regardée alors comme un honneur, et non comme une simple exemption de quelques charges publiques.

Blondel mourut le 20 février 1686. Marié deux fois, il avait eu deux enfants de sa première femme ; l’un fut chartreux [1], et l’autre abbé commendataire de Tenailles. Le père avait été maître de mathématiques de M. le Dauphin, fils de Louis XIV.

De plus grands mathématiciens ont eu moins d’honneurs et de places ; mais Blondel a eu le mérite d’appliquer les mathématiques à deux arts bien chers à l’orgueil des grands : l’art d’élever des masses éternelles, et surtout celui de détruire les hommes [2].

  1. Blondel de Gayne.
  2. Les progrès qu’a faits l’art militaire ont été funestes à l’humanité. Il ne peut plus y avoir de liberté dans les nations qui ont besoin, pour leur sûreté, d’entretenir ce qu’on appelle des troupes réglées ; ce n’est plus qu’au sein de l’Océan, ou sur les sommets des Alpes, qu’elle peut trouver un asile.
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