Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/605

Cette page n’a pas encore été corrigée
585
ÉLOGE DE M. DE MONTIGNI.


de contrarier son goût pour les sciences, lui offrait, clans plusieurs des fonctions de cette place, un moyen de consacrer ses lumières à l’utilité publique. M. Trudaine le père était lié avec lui depuis sa jeunesse : ce magistrat éclairé sentit bientôt combien, pour le succès de ses vues patriotiques, il pouvait trouver de ressources dans un savant qui, membre d’une cour souveraine, joignait à des connaissances très-étendues dans toutes les branches de la physique, l’étude des lois et celle des principes de l’administration.

Toutes les fois que le gouvernement s’occupe de la culture, de l’industrie, des manufactures, du commerce, des travaux publics, des moyens d’établir des communications, des effets que la forme ou la répartition des impôts peuvent produire, des lois qui règlent ces limites au delà desquelles l’exercice de la propriété peut devenir contraire à la conservation ou aux droits des autres hommes, ce n’est que dans les sciences physiques qu’il peut trouver la base de ces opérations. Mais un homme qui ne connaîtrait que les principes de ces sciences, et même leur application aux arts, ne donnerait à l’administration que des lumières incomplètes ; il pourra montrer où est le mal, mais non indiquer les moyens de le réparer ; il saurait à quel but on doit tendre, mais il ignorerait par quelle route on peut espérer de l’atteindre : deux hommes qui ne voient que la moitié d’un objet, ne peuvent, quelques lumières, quelques talents qu’ils aient, équivaloir à un seul homme capable de l’embrasser tout entier.