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ÉLOGE DE M. BERNOULLI.


ment à la mécanique spéculative, aux lois du mouvement abstrait des corps, mais à la physique, aux phénomènes de l’univers dans l’état réel, et tels que l’observation nous les présente.

Personne n’a su trouver plus de ressources dans l’analyse pour soumettre à ces calculs toutes les circonstances d’un phénomène ; personne n’a su mieux disposer une expérience pour la rendre propre, soit à confirmer les résultats de la théorie, soit à servir de base au calcul. Partout il est philosophe et physicien autant que géomètre. La finesse semble être la qualité dominante de son esprit ; mais il l’a portée à un si haut degré, il l’a si heureusement employée, et elle l’a si bien servi, que cette qualité prend chez lui un caractère de grandeur, et produit ce sentiment d’admiration et d’étonnement qui semble réservé aux prodiges qu’enfantent la force et la profondeur du génie.

En 1748, M. Daniel Bernoulli remplaça son père dans l’Académie des sciences : M. Jean Bernoulli, son frère, lui a succédé dans cette même place qui, depuis qu’elle a été créée, en 1699, c’est-à-dire, depuis quatre-vingt-six ans, a été occupée par des savants de son nom, espèce de succession bien glorieuse, puisqu’elle prouve que, dans cette famille, vraiment respectable, les talents n’ont pas été moins héréditaires que les titres. Si l’orgueil de la naissance pouvait n’être pas une faiblesse puérile, on serait tenté de l’excuser lorsqu’il s’appuierait sur une pareille illustration, et non sur ces listes généalogiques dans lesquelles une vanité sans pudeur étale