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ÉLOGE DE M. BERNOULLI.


réunissaient alors le mérite de la nouveauté à celui de l’élégance.

La théorie des suites est plus féconde qu’aucune autre partie des mathématiques, en paradoxes singuliers, qui, offrant une contradiction apparente entre les résultats du calcul et une proposition évidente par elle-même, seraient le scandale de la géométrie, si le calcul, manié par des mains habiles, ne savait faire sortir la vérité de ces mêmes résultats qui semblent la contredire. M. Bernoulli avait remarqué quelques-uns de ces paradoxes dès ses premiers travaux sur les suites ; mais l’explication qui s’offrit à lui était telle que, jeune encore, il n’osa la proposer ; il attendit, pour la faire paraître, que son âge et sa gloire lui eussent donné plus d’autorité dans les sciences, espèce de pudeur commune à tous les bons esprits, lorsque la suite de leurs idées les conduit à des résultats extraordinaires.

Il existe des séries dont la somme est périodique, et redevient la même au bout d’un certain nombre de termes ; tant que ce nombre est déterminé, il est aisé d’avoir cette somme, puisqu’on sait à quel terme de la période il répond ; mais si le nombre des termes est infini, quelle doit alors être la somme de la série ? On ne peut supposer ce nombre infini plutôt d’une des formes qui répondent à un des termes de la période, que de toute autre forme, plutôt pair d’impair ; par exemple, M. Bernoulli lire de cette difficulté même le principe qui, selon lui, doit la résoudre : « Puisqu’il n’y a, dit-il, aucune raison suffisante de préférer une forme à une autre, il faut