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ÉLOGE DE M. TRONCHIN.


qu’il nous apprenait à nous en préserver par l’inoculation. Sa méthode était simple et contrariait peu les désirs du malade : il lui prescrivait de respirer un air pur et frais, de se désaltérer avec des boissons antiputrides, de diminuer, par tous les soins de la propreté, une partie des dégoûts et des incommodités de la maladie. Par ce moyen, il mourait moins de malades, et la mort de ceux qu’il ne pouvait sauver était moins affreuse.

Ainsi la méthode de M. Tronchin diffère beaucoup de celle qu’il trouva établie. Le temps seul peut nous apprendre si c’est à leur utilité ou à leur nouveauté que les changements introduits par lui, ou à son exemple, durent les réclamations qu’ils excitèrent ; et sur plusieurs points il a déjà prononcé en sa faveur.

Lorsque M. Tronchin vint s’établir à Paris, il essuya tout ce que la haine peut produire dans une carrière où il attaquait à la fois la gloire et la fortune de ses rivaux. Au tort d’être étranger, d’être novateur et d’avoir des succès et de la vogue, il joignait celui d’avoir établi l’inoculation, contre laquelle toutes les espèces de préjugés semblaient s’être réunis. Mais il triompha de tous ces obstacles par son sang-froid et son courage, ne répondant aux critiques qu’en guérissant les maladies ; consultant sans peine avec les médecins qui, dans d’autres circonstances, avaient refusé de consulter avec lui ; retournant, sans se faire solliciter, sans se permettre aucun reproche, chez les malades qui l’avaient abandonné ; ne songeant point à son amour-