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ÉLOGE DE M. TRONCHIN.


quement, et à laquelle il sacrifia son évêché. Après sa retraite, cet aïeul de M. Tronchin resta dans cette ville jusqu’au temps du massacre de la Saint-Barthélémy, où il fut sauvé par un prêtre de ses amis, qui fut obligé de le faire cacher dans un tonneau. Le fanatisme des persécuteurs ne sait point respecter la vertu, dans ceux même qu’il regarde comme des objets sacrés.

Il choisit Genève pour asile, servit utilement cette république naissante dans quelques négociations, y obtint la bourgeoisie, et devint membre du tribunal appelé le conseil des deux cents.

Son fils, Théodore Tronchin, se distingua par ses lumières et même par sa modération dans le synode de Dordrecht, dont les décisions fuient si fatales au repos et à la liberté de la Hollande. Il fut employé à la rédaction d’un formulaire de doctrine pour les églises suisses ; car les ministres protestants, en s’élevant contre l’autorité de l’Église romaine, voulaient forcer les laïques à se soumettre à l’autorité de leurs synodes. Ils soutenaient contre Rome le droit qu’ont les particuliers d’interpréter l’Écriture, et persécutaient quiconque avait la hardiesse de l’entendre autrement qu’eux. Ils attaquaient les mystères que l’Église romaine a reçus, parce que ces mystères, disaient-ils, sont contraires à la raison ; et ils faisaient périr dans les flammes ceux qui osaient opposer la raison aux mystères que les Églises protestantes avaient conservés. Cette conduite n’était ni juste, ni conséquente, ni même politique. Elle écartait de leurs Églises ceux que la liberté de penser aurait pu