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ÉLOGE DE M. DE MAUREPAS.


En effet, on lui demanda sa démission, et il l’ut exilé à Bourges en 1749 ; mais il eut la consolation de voir que si l’on attribuait sa disgrâce à des imprudences comme particulier, la voix publique respectait sa conduite comme ministre et comme citoyen. Il est difficile de passer en un instant d’une grande place à l’état d’homme privé, et de la cour en un lieu d’exil, sans éprouver une émotion du moins passagère. M. de Maurepas, qui ne mettait de faste dans aucune de ses actions, n’en mit point dans la manière dont il supporta cet événement. « Le premier jour, disait-il, j’ai été piqué ; le second, j’étais consolé. » Il plaisantait, à son arrivée dans son exil, sur les épîtres dédicatoires qu’il allait perdre, sur le chagrin des auteurs qui lui en avaient préparé, et qui regrettaient les peines que leurs phrases leur avaient coûtées, beaucoup plus que lui-même n’avait regretté sa place. Obligé de vivre dans les sociétés d’une ville de province, il s’en amusa comme de celles de Paris et de Versailles ; il y trouvait les mêmes intrigues et les mêmes ridicules : les formes, les noms seuls étaient changés.

Il étudia la langue anglaise, presque inconnue en France à l’époque où il aurait pu l’apprendre, mais devenue, pendant son ministère, la langue étrangère la plus cultivée. Dans les deux derniers siècles, le désir de plaire aux reines en parlant leur langue, avait amené successivement la mode de l’italien et de l’espagnol. Ce que produisit alors l’esprit de galanterie, la réputation des philosophes et des politiques anglais l’avait fait dans noire siècle ; et il nous