Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/432

Cette page n’a pas encore été corrigée
412
ÉLOGE DE M. BUCQUET.


s’occupait de lui expliquer les motifs passagers ou locaux qui ont déterminé à établir les lois actuelles, et qu’on négligeait de lui montrer les raisons d’utilité qui peuvent les faire conserver ; qu’on lui développait le système des législations qui ont existé, et qu’on lui laissait ignorer sur quels principes doit être combiné le système d’une bonne législation, pour qu’elle ne soit fondée que sur la justice, et qu’elle n’ait d’autre but que l’utilité de ceux qu’elle oblige. Grâce à cette manière d’enseigner, la jurisprudence ne pouvait se présenter à un esprit né pour la vérité que comme une étude épineuse et rebutante ; et lorsqu’une fois on a connu des sciences qui payent par un plaisir présent le prix du travail que coûte leur étude, on se détermine difficilement à étudier celles dont on ne sent que par réflexion l’importance et l’utilité.

Il fallait cependant un état à M. Bucquet, et le seul qui pût s’accorder avec son goût était celui de médecin ; mais, au lieu de regarder l’étude comme un devoir de sa profession, il parut regarder sa profession comme un prétexte pour embrasser dans ses études un plus grand nombre de sciences. Voulant unir la pratique de la médecine à la théorie, il partageait ses journées entre les amphithéâtres et les hôpitaux, et prenait sur ses nuits le temps de rédiger ce qu’il avait appris pendant le jour ; il étudia la botanique, non en médecin qui a besoin de savoir reconnaître et distinguer les plantes qu’il emploie, mais en véritable botaniste ; il joignit à l’étude de l'anatomie colle de la chirurgie ; pour devenir meil-