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ÉLOGE DE M. DE JUSSIEU.


plus grande aux fatigues qui les lui avaient causées ; il n’avait qu’une seule crainte, et ne voyait qu’un danger, celui de quitter un pays sans l’avoir observé.

A la vérité, l’amour des sciences n’était pas la seule passion qui l’animât ; on voit, par ses lettres, que l’idée du plaisir qu’il préparait à ses frères par chacun de ses envois, eût suffi pour lui faire tout risquer et tout supporter.

Les astronomes virent, avec quelque surprise, que le botaniste qu’on leur avait associé était en même temps un mathématicien éclairé, capable de concourir avec eux aux opérations astronomiques. M. Bouguer a dit, après son retour, qu’aucun de ses coopérateurs ne lui avait été plus utile que M. de Jussieu. M. Bouguer allait même plus loin ; mais il avait eu à combattre, dans ses confrères, quelques prétentions très-excusables sans doute, si on songe qu’il était bien naturel d’être jaloux d’une gloire qui avait tant coûté ; et il n’avait trouvé dans M. de Jussieu que de la docilité et du zèle.

Pendant le temps employé aux travaux astronomiques, M. de Jussieu observa les différentes espèces d’arbres qui donnent le quinquina, les caractères botaniques qui distinguent chaque espèce, le degré de vertu de chacune, les arbres dont on mêle frauduleusement l’écorce avec celle du quinquina ; il apprit aux habitants mêmes du pays à employer cette écorce avec méthode, à en reconnaître les différentes espèces, à en tirer la matière extractive : lui-même prépara une quantité considérable d’extrait