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ÉLOGE DE M. DE LINNÉ.


que, que pour assurer à l’homme des remèdes contre les maladies rebelles et invétérées, comme, dans l’ordre moral, elle abandonne quelquefois a les peuples à des tyrans, qui deviennent entre ses mains des moyens violents, mais efficaces, de rappeler à la vie des nations engourdies et corrompues. »

M. de Linné, préparé depuis longtemps à la mort par l’affaiblissement de ses organes, la reçut comme un doux sommeil qui délivre d’un état de langueur et d’angoisses.

Il mourut vers la fin du mois de janvier 1778, regretté de sa famille et de ses disciples, qui le chérissaient comme un père, parce qu’ils en avaient trouvé en lui la tendresse vive et désintéressée ; honoré des regrets d’une nation généreuse, passionnée pour toutes les espèces de gloire, capable d’enthousiasme, parce qu’elle l’est d’héroïsme, et qui n’attend point, pour rendre hommage à ses grands hommes, qu’ils ne puissent plus jouir des honneurs qu’elle leur décerne.

Après la mort de M. de Linné, le roi de Suède lui a fait élever un monument à côté de celui que le même prince a consacré à ce Descartes, qui, négligé dans sa patrie, après sa mort comme pendant sa vie, attend encore de ses compatriotes les honneurs que les étrangers lui ont prodigués.

Un temple digne de la magnificence de Rome et du goût d’Athènes a remplacé dans cette capitale l’église modeste où les cendres de Descartes avaient été déposées ; et la France peut espérer d’y voir en-