objections de ses critiques : c’était aux sciences plutôt
qu’à sa gloire qu’il voulait élever un monument ;
aussi ne doit-on juger ce grand ouvrage que sur
sa dernière édition, et regarder les autres comme
des esquisses que l’auteur soumettait au jugement
des naturalistes. M. de Linné ne voulut pas que l’histoire naturelle fût entre ses mains une science stérile : en l’appliquant à des choses d’un usage
commun, il était utile à ses concitoyens, et il servait en même temps la science qu’il aimait, puisqu’il la
rendait plus importante aux yeux de ceux dont le
secours pouvait en accélérer les progrès. Ses ouvrages
contiennent un traité complet de matière
médicale ; des dissertations sur les plantes de Suède,
qui peuvent être utiles dans la médecine, et remplacer
les plantes étrangères ; sur celles qui peuvent
fournir aux hommes une nourriture saine et agréable,
ou qui sont employées dans les arts ; sur les végétaux
qui conviennent le mieux à chacune des espèces
d’animaux domestiques ; sur la manière déjuger de
la vertu des plantes, soit par les genres où elles sont
rangées dans sa méthode, soit par leur saveur on
par leur odeur ; sur les terrains qui conviennent à
chaque espèce ; sur des plantes qui, semées dans
des sables mobiles, peuvent les fixer, préserver le
pays des dangers auxquels les déplacements accidentels
de ces sables l’exposent, et les changer à la
longue en des terres fertiles ; sur le rapport de la
végétation de chaque plante avec les différentes
saisons de l’année ; sur l’origine do plusieurs substances, comme le baume de Tolu, la sarcocolle, la
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ÉLOGE DE M. DE LINNÉ.