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ÉLOGE DE M. DE LINNÉ.


lyse chimique aurait fourni les premiers caractères ; d’ailleurs, lorsque M, de Linné a publié sa méthode, l’analyse des substances minérales était bien éloignée du degré de perfection où l’un de ses compatriotes, le célèbre Bergman, l’a portée depuis.

Toute méthode de nomenclature est nécessairement dépendante de l’état des sciences, à l’époque où elle a été proposée ; et ce n’est qu’en la comparant avec leurs progrès, qu’on peut l’apprécier avec justice. Mais, en convenant des défauts attachés à toutes les méthodes artificielles, on ne peut s’empêcher de reconnaître qu’il faut, pour les former, joindre une vaste étendue de connaissances au talent de faire des combinaisons et de saisir des rapports ; que ces systèmes utiles, nécessaires même pour suivre sans s’égarer les détails immenses de l’histoire naturelle, servent encore à faciliter la recherche des vérités générales ; et qu’enfin, s’il y a peu de philosophie à prendre ces arrangements méthodiques pour la science elle-même, il y en a bien moins encore à les mépriser.

M. de Linné avait formé dès sa première jeunesse le projet de son système général : il s’en occupa toute sa vie. Aucun naturaliste n’avait jusqu’à lui conçu un plan si vaste ; et si on peut dans l’exécution lui reprocher quelques défauts, c’est encore un prodige qu’un seul homme ait pu le porter à ce point de perfection.

Son Système de la nature eut douze éditions en trente ans ; dans chacune il profitait de ses nouvelles observations, des travaux de sus disciples, des