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ÉLOGE DE M. DE LINNÉ.


certaine qu’un jour le fruit de leurs travaux serait remis à M. de Linné, et que leur nom, réuni au sien, n’échapperait point à la renommée. M. de Linné, en recevant ces restes précieux, pleura ses disciples : il revit leurs ouvrages, les donna au public ; et cet honneur funèbre leur fit naître des successeurs, que l’exemple de leur mort ne put rebuter.

Le système de Linnæus a sans doute quelques endroits faibles ; mais jusqu’ici aucune autre méthode n’a réuni autant d’avantages ; peut-être même les défauts qu’on reproche à ce système sont-ils inévitables dans toute méthode artificielle : faut-il pour cela les proscrire et se condamner à marcher à tâtons, parce que le flambe ait qu’on nous présente peut s’éteindre quelquefois ?

Plusieurs botanistes ont relevé des fautes dans les détails de la méthode de M. de Linné. Quand il a trouvé leurs remarques justes, il s’est corrigé ; lorsqu’elles lui ont paru mal fondées, il a fait comme s’il les eût ignorées. « Toutes les discussions dans les sciences naturelles, du moins lorsqu’elles ont un objet réel, se réduisent toujours, dit M. de Linné, à des faits bien ou mal observés, et alors les efforts réunis de tous les savants ne peuvent ni établir une erreur, ni ébranler une vérité. » Il n’eût donc combattu que pour son amour-propre ; mais le temps qu’il eût consacré à défendre sa gloire, il aimait mieux l’employer à l’accroître par de nouveaux ouvrages.

On a reproché enfin à M. de Linné d’avoir rendu