Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/344

Cette page n’a pas encore été corrigée
324
ÉLOGE DE M. MALOUIN.


qu’il portait au plus haut degré, ne lui permettait pas de rien dissimuler de cet enthousiasme. Un philosophe célèbre s’est trouvé guéri d’une maladie singulière, après avoir pris assidûment pendant quatre ans un remède ordonné par M. Malouin ; il vint le remercier : Vous êtes digne d'être malade, lui dit M. Malouin. Il ne pouvait pardonner à ceux qui, ayant été guéris par des médecins, continuaient à faire des plaisanteries sur la médecine : cette conduite lui paraissait une véritable ingratitude ; et il rompit avec un grand écrivain, qu’il avait traité avec succès, et qui depuis, dans ses ouvrages, avait attaqué la médecine et surtout les médecins.

Mais le désir d’être utile l’emportait en lui sur son humeur contre les détracteurs de la science qu’d professait. Dans une dispute assez vive qu’il avait eue avec l’un d’eux, il avait répondu sérieusement, et même avec amertume, à quelques-unes de ces plaisanteries sur la médecine qui ne prouvent pas toujours l’incrédulité de ceux qui les font. Ce prétendu incrédule tomba malade quelque temps après ; M. Malouin vint le trouver : Je sais que vous êtes malade, lui dit-il, et qu’on vous traite mal ; je suis venu : je vous hais, je vous guérirai, et je ne vous verrai plus. Il tint parole sur tous les points.

Il regardait la confiance dans les médecins comme une preuve de la justesse et de la supériorité de l’esprit ; et l’on était étonné quelquefois de l’entendre ajouter aux justes éloges qu’il donnait à MM. de Fontenelle et de Voltaire, que dans leurs écrits ces deux hommes illustres avaient constamment res-