Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/336

Cette page n’a pas encore été corrigée
316
ÉLOGE DE M. DE HALLER.


il donna la forme des romans. Dans l’un, Usong, despote vertueux et sensible, rend heureux un grand peuple en faisant régner la justice et les mœurs. Dans le second, le sage Alfred, souverain d’un pays où la noblesse et le peuple ont conservé des droits au gouvernement, perfectionne les lois, fait fleurir le commerce, les arts et les sciences ; lient l’équilibre d’une main juste et ferme entre les différents intérêts, et corrige les abus en respectant les formes établies. Le troisième est la peinture d’une aristocratie : dans ces trois ouvrages, on voit un philosophe ami de l’humanité et de la vertu ; mais peut-être on peut leur reprocher aussi un défaut commun à tous trois, c’est de supposer dans ceux qui gouvernent des talents et des vertus au-dessus du commun des hommes. Tl semble que, dans les gouvernements où le hasard de la naissance dispose du pouvoir, l’objet d’une bonne politique serait de chercher au contraire quelles doivent être les meilleures lois, en ne supposant à ceux qui commandent que des intentions droites, et ce degré de vertu, d’esprit, de lumières et de courage qu’on peut se flatter de trouver dans la plupart des hommes qui ont reçu une éducation raisonnable. Il manque à ces ouvrages une quatrième partie, qui aurait dû renfermer le tableau d’une démocratie parfaite ; mais l’exécution de cette partie de son plan eut trop exposé M. de Haller à blesser l’esprit aristocratique de Berne. Les limites de ces États sont quelquefois si peu distinctes, le passage de l’un à l’autre est souvent si facile ; enfin, dans les républiques aristocra-