longue liste de jugements sur un grand nombre
d’auteurs, jugements dans lesquels il eût été difficile
à la longue d’éviter la monotonie ou l’affectation, il
avait imaginé de distinguer, par un nombre d’étoiles
plus ou moins grand, le degré du mérite de ces auteurs.
Il embrassait dans cette liste même les auteurs
vivants. On se doute bien que peu de savants furent
contents du nombre de leurs astérisques. Nous ne
savons pas jusqu’à quel point la franchise de M. de
Haller a multiplié ses adversaires et ses critiques :
mais pour qu’un homme qui s’était chargé du devoir
de juger ses contemporains, et qui était incapable
de les flatter, ait joui, presque sans contestation, de
la renommée la plus brillante, il fallait qu’il eût un
mérite bien rare ; et si jamais la grande réputation
d’un savant a été une preuve incontestable de la supériorité de ses talents, c’est sans doute dans une
circonstance où tant d’hommes étaient intéressés à
diminuer l’autorité de ses décisions. M. de Haller
risquait dans ce moment sa considération et son
repos : il le savait, et il n’hésita point. Il ne s’agissait pas dans ces jugements de distribuer la gloire avec une équité plus ou moins scrupuleuse entre des
hommes occupés d’études frivoles, mais de décider
quels guides devaient choisir de préférence des
jeunes gens qui allaient embrasser une profession
où ils auraient à prononcer sur la vie de leurs semblables ; et M. de Haller crut que c’était une de
ces circonstances où le courage de s’exposer à la
haine, en blessant l’amour-propre, peut devenir une
vertu.
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ÉLOGE DE M. DE HALLER.
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