d’orgueil à le refuser, il sentait que son frère avait
le même droit que lui à cet acte de piété filiale ; et
comme il était vraiment généreux, il devait être
juste. Ces vertus simples et sans effort étaient héréditaires dans leur famille. Cependant, comme ils
avaient été élevés loin des yeux paternels, elles n’étaient pas en eux l’ouvrage de l’éducation. Qu’il nous
soit donc permis de croire que les vertus peuvent
aussi se transmettre par le sang ! Et pourquoi la
nature nous aurait-elle condamnés à n’hériter de nos
pères que des difformités et des maladies ? Pourquoi
l’heureuse constitution, qui rend les vertus naturelles
et faciles, ne se transmettrait-elle pas comme
celle qui donne une santé vigoureuse ?
M. de Bourdelin fut obligé de chercher dans l’exercice de la médecine un dédommagement de la perte de sa fortune : heureusement sa réputation était faite d’avance, et il n’eut qu’à en recueille- le fruit. Sa pratique était comme son caractère, simple, douce et patiente. On le voyait toujours suivre la nature, l’aider quelquefois, et ne la contrarier jamais ; n’employant qu’avec une sage épargne les secours de l’art, et n’ajoutant qu’à regret, aux dangers et aux douleurs de la maladie, les dangers et l’incommodité des remèdes ; aussi occupé de consoler et de soulager ses malades que de les guérir ; traitant chacun comme s’il était son ami et l’unique objet de ses soins ; indulgent pour leurs caprices, compatissant pour leurs peines imaginaires, et n’ayant d’indifférence que sur la manière dont ses soins seraient récompensés.