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ÉLOGE DE M. DE BOURDELIN.


delin n’a rien publié dans nos Mémoires. Il avait vu la chimie changer de face en France, par l’adoption des idées de Beker et de Stahl, à peu près comme dans le siècle dernier l’invention des nouveaux calculs avait produit une révolution dans les sciences mathématiques.

Dans ce renouvellement de la géométrie, la plupart des géomètres, trop âgés pour se plier à une marche toute nouvelle, s’élevèrent contre l’usage de ces calculs : M. de Bourdelin fut plus sage, et se contenta de suivre le fil des découvertes dont il ne pouvait partager l’honneur ; et il eut la modestie de ne plus écrire sur une science qui suivait des principes nouveaux, et qui avait adopté une langue nouvelle.

L’exactitude de ses expériences, et l’esprit de doute qu’on remarque dans ses ouvrages, font regretter qu’il n’en ait pas laissé un plus grand nombre ; mais le changement arrivé dans la chimie ne fut pas la seule cause de sa longue inaction : l’amour de l’étude n’était pas son unique passion ; il en connaissait une plus forte, la bienfaisance. Il se livra à la pratique de la médecine, et se consacra surtout au traitement des pauvres ; il se dévoua à cette profession pénible, où le spectacle douloureux des malheurs qu’on ne peut soulager l’emporte sur le plaisir du bien qu’on a pu faire ; où le médecin est obligé de payer les remèdes qu’il ordonne, et de nourrir les malades qu’il guérit. M. de Bourdelin ne regardait pas le soin qu’il prenait de visiter les pauvres, comme un essai de ses forces, comme une