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ÉLOGE DE M. TRUDAINE.


mais nécessaire, dont il n’est pas toujours obligé de faire usage, mais sans laquelle toutes les autres deviennent inutiles, et dont le défaut lui ôte sa plus grande force, la confiance de ceux qui lui obéissent.

Cette étude approfondie des lois eût suffi pour faire un magistrat éclairé, et même un savant jurisconsulte ; mais des connaissances d’un autre genre lui paraissaient également indispensables pour bien remplir la place où il se voyait appelé : le commerce, les manufactures, les ponts et chaussées formaient une partie du département de son père.

Les matières du commerce et leurs préparations, les procédés des arts, la théorie et la pratique des constructions parurent donc à M. Trudaine autant d’objets dont l’étude lui devenait nécessaire : ne pouvant, sans cette étude, ni connaître les choses, ni juger les hommes, il aurait été forcé ou d’agir au hasard, ou d’obéir aveuglément aux guides qu’il aurait choisis. Aussi, non-seulement il était bien éloigné de vouloir se contenter de ces connaissances superficielles qui donnent plus de présomption sans donner plus de savoir réel, qui mettent en état de parler et non déjuger ; mais même il aurait senti que des connaissances purement pratiques, avec lesquelles il eût été toujours, dans chaque genre, au-dessous des gens de l’art, ne suffisaient pas à un magistrat qui doit voir et agir en grand, et connaître non-seulement ce qui est, mais ce qui doit être. Il a vu que des lumières étrangères ne peuvent guider un administrateur : en effet, vainement il con-