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ÉLOGE DE M. LA CONDAMINE.


il ne méprisait aucun suffrage, pas même ceux des gens méprisables : c’est une faiblesse qu’ont eue beaucoup de grands hommes, et dont l’amour de la gloire ne peut les excuser.

Avec une âme ardente et une constitution forte, il dut être entraîné vers les plaisirs : mais il eut le courage d’y renoncer, pour aller passer dix ans dans les déserts du Pérou ; ce qui prouve du moins que sa première passion était le plus noble de tous les sentiments, le désir de mériter un nom illustre par des services rendus à l’humanité.

M. de la Condamine eut donc des défauts et des faiblesses : mais il eut cet avantage, que ses défauts tenaient à des qualités respectables, et que ses faiblesses furent plus que compensées par des vertus vraiment utiles. Ses défauts et ses faiblesses seront bientôt oubliés, et il ne restera plus de lui que le souvenir du bien qu’il a fait aux hommes.

Quelques mois avant sa mort, il revit un de ses anciens compagnons de voyage, M. Godin des Ordonnais, parent de l’académicien de ce nom, qui vient de revenir en France, après quarante ans d’absence et des malheurs inouïs. M. de la Condamine écrivit, à cette occasion, une petite lettre sur le sort de ceux qui avaient eu part à la mesure du méridien ; il y parle de ses maux avec gaieté, et avec sensibilité de ceux des autres : enfin, il eut l’avantage d’intéresser, aux malheurs de M. Godin, le public et le gouvernement, et le dernier écrit qu’il ait publié a été une action de bienfaisance.

La plupart des ouvrages de M. de la Condamine