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ÉLOGE DE M. LA CONDAMINE.


fleur de lis au haut de la pyramide, il fallut soutenir un long procès à l’audience de Quito. Une opération si utile aux sciences fut sur le point d’être détruite, parce qu’on n’entendait pas à Quito le latin du style lapidaire. M. de la Condamine gagna pourtant sa cause, et en fut quitte pour placer une couronne fermée sur la fleur de lis.

Les officiers de marine espagnols, blessés de ne paraître dans l’inscription qu’à la suite des académiciens, avaient suscité ce procès ; mais il faut leur rendre la justice, que cette discussion n’altéra point leur union avec nos académiciens, et que, lorsqu’après le départ des Français, on surprit à la cour d’Espagne un ordre de détruire les pyramides, ils employèrent leur crédit pour le faire révoquer. Ce n’était donc pas l’intérêt de leur gloire qui avait excité les deux savants espagnols à se plaindre de l’inscription des pyramides ; c’était l’orgueil national, sentiment respectable, lorsqu’au lieu de s’applaudir d’une supériorité vraie ou prétendue, il s’occupe de l’acquérir ou de la conserver. C’est par un effet de ce même sentiment, pour cette fois bien entendu, que les deux savants espagnols réclamèrent contre l’ordre de la démolition des pyramides, et qu’ils oublièrent le petit intérêt d’une inscription plus ou moins glorieuse, pour ne plus sentir que le reproche qu’allait attirer sur leur patrie la destruction d’un monument élevé aux sciences.

Je n’ai point interrompu le récit des opérations des académiciens, par le détail de quelques faits personnels à M. de la Condamine. La générosité qu’il