Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/187

Cette page n’a pas encore été corrigée
167
ÉLOGE DE M. DE LA CONDAMINE.


hommes, et il faut avouer avec regret que tout l’avantage était alors pour la nation anglaise. En exécutant la mesure d’un degré du méridien, les Français allaient mériter à leur patrie un honneur dont elle pourrait se glorifier à phis juste titre que l’Angleterre ne s’enorgueillit des découvertes de Newton ; car une découverte est l’ouvrage d’un homme dont le sort place la naissance où il lui plaît : mais une entreprise comme celle de la mesure du degré, qui demande la protection du gouvernement et l’approbation du public, doit être regardée comme l’ouvrage de toute une nation. Ainsi, tandis que les faiseurs de brochures accusaient sérieusement les nestoriens d’être de mauvais citoyens, ces nestoriens s’occupaient de la gloire de la France : l’Académie approuva leurs vues ; elle n’eut pas de peine à obtenir de M. le comte de Maurepas les secours nécessaires pour un si grand projet. Ce ministre, petit -fils du restaurateur de l’Académie, et né, pour ainsi dire, avec elle, avait toujours regardé le soin d’encourager les savants et de concourir aux progrès des sciences, comme le devoir de sa place le plus agréable à remplir, et le plus propre à le consoler des soins pénibles du gouvernement [1].

MM. de la Condamine, Bouguer et Godin furent donc chargés, par l’Académie, de faire à l’équateur les observations nécessaires pour déterminer la figure de la terre, et ils partirent pour le Pérou. Dès

  1. Lorsque cet éloge fut lu à l’Académie, M. de Maurepas n’était pas rentré dans le ministère.