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BEVIS.


1770 ; deux jours avant de mourir, il paraissait avoir perdu toute connaissance. « Me reconnaissez-vous ? » lui dit le père Jaquier, peu d’instants avant sa mort. « Oui, répondit le mourant ; vous êtes celui avec qui je viens de résoudre une équation très-difficile. » Ainsi, au milieu de la destruction de ses organes, il n’avait pas oublié quels furent les objets de ses études, et il se rappelait un ami avec qui tout lui avait été commun.

Le père Jaquier fut arraché des bras de son ami mourant, par des amis qui, pour me servir des expressions du père Jaquier lui-même, ne voulaient pas avoir à les regretter tous deux.

Il a repris une chaire que sa santé l’avait obligé de quitter. Moins occupé de prolonger des jours que l’amitié ne console plus, il veut du moins les remplir par des travaux utiles, et suspendre le sentiment d’une douleur dont rien ne peut le guérir. Il sait qu’il ne faut pas ajouter le poids du temps à celui du malheur, et que, pour les âmes qui souffrent, le loisir est la plus cruelle des tortures.

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LE DOCTEUR DEVIS.


Ce savant, mort en 1771, à l’âge de soixante seize ans, renonça à la fortune qu’il eût pu faire dans l’état de médecin, se condamna à une vie laborieuse et pauvre, et l’employa presque tout entière à construire une carte céleste exacte et un