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PEYSSONNEL.


qui est nouveau et brillant. Mais cette défiance, qu’il ne faut pas confondre avec l’envie, est utile aux progrès des sciences ; elle oblige les inventeurs à chercher de nouvelles preuves de leurs assertions, et c’est souvent une occasion de faire encore de nouvelles découvertes.

Quand une observation si belle et si neuve n’aurait pas mérité à M. Peyssonnel une place distinguée parmi les naturalistes français, il serait encore digne de nos éloges comme citoyen.

Dans sa jeunesse, il avait formé le projet d’établir à Marseille une chaire de matière médicale destinée principalement à l’instruction des navigateurs. Ce projet, utile au commerce, auquel il pouvait offrir de nouveaux objets et des spéculations nouvelles, ne l’eût pas été moins à l’histoire naturelle, à une époque surtout où l’on ignorait presque absolument l’origine et la préparation des drogues qui sont un objet de commerce. Cet objet eût été une source de richesses et de lumières. Il ne put réussir. M. Peyssonnel s’était borné à montrer l’utilité, et il croyait avoir tout fait : il ne savait pas qu’il fallait encore que tous ceux dont le concours était nécessaire pour le succès eussent part à la gloire. Il avait beaucoup moins observé les hommes que les plantes. Les hommes qui ne vivent que pour eux-mêmes, et ceux dont les passions dominantes sont l’amour de la vérité et du bonheur public, semblent former deux espèces bien distinctes : celui qui appartient à l’une n’appartiendra jamais à l’autre.

M. Peyssonnel n’était pas heureux dans ses projets