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ce que les citoyens ont droit d’attendre

Mais on doit une indulgence égale aux hommes qui, plus fortement frappés de ce qui les entoure, craignent de négliger leurs intérêts les plus pressants, en portant leurs vues sur un champ trop vaste.

C’est précisément parce que les hommes exagèrent en sens contraire, qu’on peut espérer d’obtenir, par leur réunion, des résolutions que la raison et la prudence puissent approuver.

L’intolérance des opinions, la fureur de faire dominer les siennes, si elles pouvaient se trouver réunies à un esprit juste, éclairé, capable de combinaisons étendues, l’égareraient bientôt, et le conduiraient à des excès que, rendu à lui-même, il désavouerait en rougissant.

Telles sont les réflexions que je soumets à mes collègues ; écarté de la tribune par l’impossibilité de parler, sinon dans une discussion tranquille, j’ai cru devoir employer un autre moyen de leur dire des vérités que je crois pouvoir être utiles.

Je pourrais peut-être aussi les occuper un moment de mes calomniateurs ; mais j’aime mieux parler aux citoyens de leurs intérêts que des miens.

Je servirai la cause de la liberté comme un homme fortement convaincu que le sort du genre humain, pendant plusieurs générations, dépend du succès de la révolution actuelle. Je défendrai l’égalité des droits : elle seule, par des moyens paisibles et sûrs, peut conduire à cette égalité dans les moyens de bonheur, qui est le vœu de la nature, et qu’une société bien ordonnée étend et perfectionne.

Étranger à tout parti, m’occupant à juger les choses