réflexions sur la nécessité de donner bientôt à la France une constitution nouvelle.
I. On n’a vu aucun peuple subsister paisiblement en corps de nation, si ce n’est à l’abri d’institutions consacrées, soit par l’habitude, soit par la superstition, ou de lois difficilement révocables.
En effet, sans quelque fixité dans les lois, il ne peut y avoir ni égalité, ni liberté, ni prospérité publique, il ne peut y avoir d’égalité, parce qu’il faut plus ou moins de temps aux citoyens pour acquérir la connaissance des lois, et pour disposer leurs affaires ou leur manière de vivre d’après les moyens d’agir que ces lois leur donnent ou leur laissent.
Il n’y a point d’égalité, parce que celle de la loi ne devient réelle qu’après que les habitudes sociales ont eu le temps de se former d’après elle.
Il ne peut y avoir de liberté : un citoyen est libre sous la loi, parce qu’elle est une convention qu’il a volontairement formée, puisqu’il a consenti au mode suivant lequel cette loi est faite. Mais il a consenti à soumettre ses actions à une règle, parce qu’alors il peut les combiner de manière à rendre insensible la gêne que cette règle lui impose ; et il ne peut vouloir que cette règle, toujours changeante, lui impose chaque jour un joug dont ni l’habitude, ni une conduite dirigée par la raison, ne puisse alléger le poids.
Il ne peut y avoir de prospérité publique, parce qu’elle n’est que le résultat des efforts de chaque individu pour augmenter sa prospérité particulière ; et ces efforts ne peuvent être que très-faibles, si des