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du plan de constitution.

de la sauver par des injustices, ou par ce qui en est presque toujours une, par une rigueur exagérée. Nous avons cru trouver un moyen d’éviter ces deux inconvénients, en donnant au corps législatif le droit de mettre en jugement les membres du conseil, pour des faits sur lesquels un jury national prononcerait seulement si celui qui est soumis à son jugement doit ou non être destitué. Par là, les fautes involontaires ne sont point confondues avec les crimes ; mais aussi les défauts qui les ont fait commettre cesseront de menacer la sûreté ou la prospérité publique.

Cette espèce de censure exercée, au nom du peuple, par des hommes qu’il aura élus, par des hommes à qui aucune autre fonction ne peut donner d’intérêt politique, que le sort appelle à prononcer, dont on a eu le temps de préparer les opinions, cette censure paraît avoir l’impartialité que l’intérêt et la dignité de la nation peuvent exiger.

Le corps législatif n’est chargé que des fonctions qui lui conviennent : celles de la surveillance ; et l’on écarte de lui jusqu’au soupçon même de l’abus de pouvoir, de tout ce qui peut atténuer cette intégrité de la confiance publique, premier besoin des représentants du peuple, base première de l’ordre et de la tranquillité.

Dans l’intervalle entre l’acte du corps législatif et le jugement, les membres du conseil seraient suspendus de leurs fonctions et remplacés par un de leurs suppléants tiré au sort, afin d’éviter le soupçon que l’intérêt de l’ambition d’un d’entre eux ait pu agir sur la décision de l’assemblée.