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posons qu’en exerçant son autorité usurpée, un roi héréditaire et absolu n’ait commis aucune injustice, aucune violence ; supposons qu’aveuglé par son éducation, il ait cru de bonne foi son autorité légitime ; admettons ces deux hypothèses qu’aucun roi n’a peut-être réalisées. Ne peut-on pas dire alors : l’erreur involontaire absout de la peine ? mais le droit de se précautionner contre les effets de cette erreur n’en subsiste pas moins. On ne punit point un homme en démence, mais on prend les moyens nécessaires pour l’empêcher de nuire : et si la liberté de Louis XVI, innocent, était dangereuse pour la sûreté de la nation, sans doute elle aurait encore le droit de l’en priver.

Mais comment pourrions-nous, sans injustice, réserver le droit de prendre des précautions de sûreté, dans le cas de l’absolution, sans réserver en même temps, dans le cas de condamnation, celui de modifier la peine ?

Ainsi, en donnant aux considérations politiques tout le poids qu’on peut leur supposer, on voit qu’elles sont étrangères à la question du jugement, mais qu’elles peuvent seulement influer sur la commutation de la peine prononcée, sur les précautions que l’intérêt national pourrait exiger. Juger un roi accusé est un devoir ; lui pardonner, peut être un acte de prudence ; en conserver la possibilité, est un acte de sagesse dans ceux à qui les destinées politiques de la nation ont été confiées.

Je proposerai donc d’ajourner jusqu’après la décision des autres questions, et immédiatement avant