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DE LA NATURE
DES
POUVOIRS POLITIQUES
DANS UNE NATION LIBRE.

Les hommes ont tellement pris l’habitude d’obéir à d’autres hommes, que la liberté est, pour la plupart d’entre eux, le droit de n’être soumis qu’à des maîtres choisis par eux-mêmes. Leurs idées ne vont pas plus loin, et c’est là que s’arrête le faible sentiment de leur indépendance. Le nom même de pouvoir^ donné à toutes les fonctions publiques, atteste cette vérité. Presque partout cette demi-liberté est accompagnée d’orages ; alors on les attribue à l’abus de la liberté, et l’on ne voit pas qu’ils naissent précisément de ce que la liberté n’est pas entière ; on cherche à lui donner de nouvelles chaînes, lorsqu’il faudrait songer, au contraire, à briser celles qui lui restent.

La raison, d’accord avec la nature, ne met qu’une seule borne à l’indépendance individuelle, n’ajoute qu’une seule obligation sociale à celles de morale particulière : c’est la nécessité et l’obligation d’obéir dans les actions qui doivent suivre une règle com-