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LXXXIV
BIOGRAPHIE

Dans l’édition que Condorcet a donnée de Pascal, on lit cette pensée si souvent reproduite :

« Parlons selon les lumières naturelles. S’il y a un Dieu, il est infiniment incompréhensible, puisque n’ayant ni principes, ni bornes, il n’a nul rapport à nous ; nous sommes donc incapables de connaître ni ce qu’il est, ni s’il est. »

Le membre de phrase, ni s’il est, ne se trouvait pas dans les plus anciennes éditions des œuvres de l’illustre penseur. Condorcet semblait donc s’être permis une inexcusable interpolation, une blâmable addition au texte de l’auteur. Cette grave conjecture acquit un poids immense, lorsqu’en 1803, M. Renouard, célèbre bibliographe, déclara (ce sont ses propres expressions) qu’une recherche obstinée dans les manuscrits de Pascal, conservés à la Bibliothèque royale, ne lui avait point fait découvrir les trois mots contestés.

L’autorité de M. Renouard en pareille matière devait au moins laisser en suspens ceux-là même qui n’avaient jamais douté de la parfaite droiture de Condorcet ; mais est-il permis aujourd’hui d’invoquer le témoignage du célèbre