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DE LA SCIENCE, ETC.


l’ordre qu’on a besoin de leur donner, et de pouvoir saisir facilement les rapports qu’ils présentent, est, pour ces faits, ce que la théorie des combinaisons est pour les faits hypothétiques. Cet art de déduire les faits généraux des faits observés est encore une des bases de la mathématique sociale ; et il a deux parties : l’une, la recherche des faits généraux ; l’autre, celle des lois générales qui peuvent en résulter ; c’est proprement l’art de faire des découvertes par l’observation.

Un tableau qui exprime pour un nombre d’hommes, nés le même jour, combien survivent après la première année, après la seconde, etc., présente une suite de faits généraux, tels que celui-ci : dans tel pays, la moitié des hommes péril avant d’avoir atteint l’âge de dix ans ; mais si je puis représenter ce même tableau par une formule, alors j’ai une loi générale. Telle serait celle-ci : sur un nombre donné d’hommes de tel âge, il en meurt chaque année un nombre égal, ou, ce qui revient au même, le rapport du nombre des morts, pour chaque année, à celui des survivants, croit suivant une progression arithmétique [1].

Entre les faits donnés par l’observation, souvent on n’en trouvera pas deux qui soient rigoureusement semblables ; cependant, quand leur différence est

  1. Cette loi a été proposée par Moivre ; elle est assez d’accord avec l’observation, depuis dix ans jusqu’à quatre-vingts, et on peut, dans plusieurs circonstances, l’employer pour abréger les calculs. Lambert, le citoyen Duvillard, ont présenté d’autres lois de mortalité plus exactes, mais plus compliquées.