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DE LA SCIENCE, ETC.


l’algèbre, tantôt la méthode analytique, et nous serons même obligés d’employer quelquefois ce même mot dans le sens qu’on lui donne dans d’autres sciences.

Je préfère le mot sociale aux mots morale ou politique, parce que le sens de ces derniers mots est moins étendu et moins précis.

Cette exposition montrera toute l’utilité de cette science ; on verra qu’aucun de nos intérêts individuels ou publics ne lui est étranger, qu’il n’en est aucun sur lequel elle ne nous donne des idées plus précises, des connaissances plus certaines ; on verra combien, si cette science était plus répandue, plus cultivée, elle contribuerait, et au bonheur et au perfectionnement de l’espèce humaine.

Deux observations suffiront pour le faire sentir. D’abord, presque toutes les opinions, presque tous les jugements qui dirigent notre conduite, s’appuient sur une probabilité plus ou moins forte, toujours évaluée d’après un sentiment vague et presque machinal, ou des aperçus incertains et grossiers.

Il serait impossible, sans doute, de parvenir à soumettre au calcul toutes ces opinions, tous ces jugements, comme il le serait également de calculer tous les coups d’une partie de trictrac ou de piquet ; mais on pourrait acquérir le même avantage qu’obtient aujourd’hui le joueur qui sait calculer son jeu sur celui qui ne joue que d’instinct et de routine.

De plus, les vérités absolues, celles qui subsistent indépendamment de toute mesure, de tout calcul,