Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/729

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
SUR LE MOT


PAMPHLÉTAIRE.


(1790.)



La révolution française a enrichi la langue de plusieurs mots nouveaux.

Celui de pamphlétaire a été inventé par M. le premier président du ci-devant Conseil souverain d’Artois[1] ; mais il a oublié d’en déterminer le sens. Il dit que si un roi s’avise de raisonner au lieu d’ordonner, s’il imprime ses observations sur les lois de son pays, il deviendra un pamphlétaire comme un autre ; d’où il résulte évidemment qu’un pamphlétaire est un homme qui, ayant réfléchi sur les lois de son pays, expose à ses frères le résultat de ses réflexions. Cicéron, Locke, Hume, Montesquieu, étaient des pamphlétaires.

Autrefois les présidents, qui avaient acheté le droit de juger, avaient es pamphlétaires en horreur ; ils les accusaient de les empêcher quelquefois de pendre qui ils voulaient.

Quant à la crainte que les rois n’aient envie de raisonner, elle est particulière à M. le président d’Artois ; ses confrères priaient autrefois les rois de vouloir bien raisonner avec eux.

  1. Le conseil souverain d’Artois a été supprimé par l’art. 14 de la loi du à septembre 1790.