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DISCOURS


possibles d’esprit, d’application ou de mémoire, avantage que la plupart des autres connaissances ne peuvent avoir au même degré.

On nous fera peut-être une objection. Vous convenez, nous dira-t-on, que vous ne pouvez donner que des lumières superficielles, et, par là, vous augmenterez les prétentions beaucoup plus que l’instruction ; vous répandrez le jargon scientifique plutôt que la science ; on oubliera les choses, mais on retiendra les mots. Cette crainte est si bien fondée, qu’elle n’est pas même désobligeante pour vos auditeurs. On pourrait citer l’exemple de plusieurs hommes illustres, qui ont fait des termes de mathématiques un usage que la raison et le goût doivent réprouver également.

On vous en citera d’autres, même encore assez célèbres, qui, en répétant ce dont ils se souvenaient mal, parce qu’ils ne l’avaient jamais bien appris, ont cru faire admirer la profondeur de leur doctrine et n’ont réussi qu’à se rendre plus ou moins ridicules.

Mais c’est aussi par cette raison qu’au lieu d’enseigner beaucoup, nous chercherons à bien enseigner, à suppléer par des développements philosophiques à la facilité d’entendre et de retenir que donne l’habitude de l’étude et des calculs, à n’insister enfin que sur les choses dont nous croyons qu’on peut aimer à se souvenir.

Toutes les prétentions naissent également de l’ignorance de l’homme, et de l’ignorance plus grande qu’il suppose à ceux devant lesquels il les montre : ainsi nous croyons que le meilleur moyen de dimi-