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L
BIOGRAPHIE


tiés vulgaires que fait naître la conformité des goûts et des intérêts. La leur devait son origine à un attrait naturel et irrésistible. Dans ces amitiés profondes et délicieuses, chacun souffre toutes les souffrances de son ami, et sent tous ses plaisirs. On n’éprouve pas un sentiment, on n’a pas une pensée où son ami ne soit mêlé ; et si on s’aperçoit qu’on n’est pas un avec lui, c’est uniquement par la préférence qu’on lui donne sur soi-même. Cet ami n’est pas un homme que l’on aime, que l’on préfère aux autres hommes ; c’est un être à part et à qui rien ne ressemble : ce ne sont ni ses qualités, ni ses vertus qu’on aime en lui, puisqu’un autre aurait pu les avoir et qu’on ne l’aurait pas aimé de même ; c’est lui qu’on aime, et parce que c’est lui. Ceux qui n’ont point goûté ce sentiment peuvent seuls nier qu’il existe ; il faut les plaindre… ......................... … « Dès l’instant où ils se furent rencontrés à Rome, tout fut commun entre eux : peines, plaisirs, travaux, la gloire même, celui de tous les biens peut-être qu’il est plus rare que deux hommes aient partagé de bonne